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Biblioteca Fluorescente, La Sapienza, Rome 2007 - © Éric Michel
"Fluorescence"
in Éric Michel, Véronique Smagghe, Paris, 2008.
Texte écrit à l’occasion de l’exposition : Éric Michel, « Fluorescence », Musée d'Art et d'Histoire de Villeneuve-Loubet, 9 février - 26 mars 2008.
Le travail d’Éric Michel s’appréhende par couches successives de sensations. Car si l’art conceptuel traverse son oeuvre, celle-ci reste intimement liée au domaine du ressenti. Sa quête de l’immatériel n’est pas une pure abstraction. Chaque installation est un moyen d’en faire l’expérience. L’artiste interroge nos rapports au réel, jouant sur la frontière du matériel et de l’immatériel, tel un intermédiaire, un « passeur », selon ses mots. Mais Éric Michel a bien conscience de l’inaccessibilité du but qu’il s’est fixé. Seul compte pour lui l’exploration. Le cheminement prévaut sur la finalité. A la différence du charismatique Yves Klein qui nous offrait les « cendres de son art », Éric Michel est bien décidé à nous faire partager ses expériences physiques et spirituelles.
D’abord la dimension haptique de son travail surprend et cette sensation de « toucher du regard » nous envahit. Vient s’ajouter à cet effet purement physique une émotion, une résonance intérieure. La source lumineuse qui éclaire, qui révèle -question récurrente en histoire de l’art- devient un sujet en soi et trouve sa puissance magnétique dans le monochrome et les couleurs fluorescentes. Loin de révéler un univers aseptisé, néons et pigments purs, hérités de l’esthétique des années soixante-dix, créent une atmosphère transcendantale neutre. Ce « bain lumineux » confère à l’espace une dimension tout à fait autre et alimente l’ambivalence entre fascination et retrait. L’artiste déstabilise notre perception et parvient à créer des « états visuels particuliers » comme disait Donald Judd au sujet de Dan Flavin.
La matérialité de la lumière nous absorbe jusqu’à nous plonger dans une profonde immersion propice à la méditation. Ce même phénomène d’imprégnation que James Turrell met en oeuvre dans ses installations. Là aussi on refuse tout pathos. Aucune visualisation d’un sentiment, encore moins d’un moi intérieur. Le sujet est évacué au profit de l’effet. Éric Michel nous invite à faire l’expérience de la Profondeur ; mais qu’est-ce que la Profondeur sinon quelque chose d’ineffable ?
in Éric Michel, Véronique Smagghe, Paris, 2008.
Texte écrit à l’occasion de l’exposition : Éric Michel, « Fluorescence », Musée d'Art et d'Histoire de Villeneuve-Loubet, 9 février - 26 mars 2008.
Le travail d’Éric Michel s’appréhende par couches successives de sensations. Car si l’art conceptuel traverse son oeuvre, celle-ci reste intimement liée au domaine du ressenti. Sa quête de l’immatériel n’est pas une pure abstraction. Chaque installation est un moyen d’en faire l’expérience. L’artiste interroge nos rapports au réel, jouant sur la frontière du matériel et de l’immatériel, tel un intermédiaire, un « passeur », selon ses mots. Mais Éric Michel a bien conscience de l’inaccessibilité du but qu’il s’est fixé. Seul compte pour lui l’exploration. Le cheminement prévaut sur la finalité. A la différence du charismatique Yves Klein qui nous offrait les « cendres de son art », Éric Michel est bien décidé à nous faire partager ses expériences physiques et spirituelles.
D’abord la dimension haptique de son travail surprend et cette sensation de « toucher du regard » nous envahit. Vient s’ajouter à cet effet purement physique une émotion, une résonance intérieure. La source lumineuse qui éclaire, qui révèle -question récurrente en histoire de l’art- devient un sujet en soi et trouve sa puissance magnétique dans le monochrome et les couleurs fluorescentes. Loin de révéler un univers aseptisé, néons et pigments purs, hérités de l’esthétique des années soixante-dix, créent une atmosphère transcendantale neutre. Ce « bain lumineux » confère à l’espace une dimension tout à fait autre et alimente l’ambivalence entre fascination et retrait. L’artiste déstabilise notre perception et parvient à créer des « états visuels particuliers » comme disait Donald Judd au sujet de Dan Flavin.
La matérialité de la lumière nous absorbe jusqu’à nous plonger dans une profonde immersion propice à la méditation. Ce même phénomène d’imprégnation que James Turrell met en oeuvre dans ses installations. Là aussi on refuse tout pathos. Aucune visualisation d’un sentiment, encore moins d’un moi intérieur. Le sujet est évacué au profit de l’effet. Éric Michel nous invite à faire l’expérience de la Profondeur ; mais qu’est-ce que la Profondeur sinon quelque chose d’ineffable ?