Xavier Theunis [en collaboration avec Gilbert Perlein]
in Petit Journal de l'exposition, « Xavier Theunis / Non peut-être ! », 25 janvier - 20 avril 2014, MAMAC, Nice
in Petit Journal de l'exposition, « Xavier Theunis / Non peut-être ! », 25 janvier - 20 avril 2014, MAMAC, Nice
Né en 1978 à Anderlecht en Belgique, Xavier Theunis étudie à la Villa Arson à Nice. Il expose dans les galeries municipales
(« Génération 2004 », galerie des Ponchettes / « Still lovin’ you », galerie de la Marine, 2008) et rejoint la galerie Catherine Issert à
Saint-Paul de Vence en 2005. Il est présent au MAMAC pour « L’art Contemporain et la Côte d’Azur » en 2011, puis entre dans les collections du musée en 2013 dans le cadre du legs d’Henrik Berggreen qui fait l’objet d’une exposition au 1er étage du musée (du 25 janvier au 1er juin 2014). Simultanément à cet événement, le musée donne carte blanche à l’artiste pour une mise en perspective de son travail dans la galerie contemporaine. Son oeuvre à l’esthétique lisse et détachée imbrique de nombreuses références au mouvement moderne et à l’art minimal. Par le recyclage de chutes d’adhésif, la découpe et le collage, Xavier Theunis rejoue avec une rigueur géométrique et un humour distancié les rapports entre l’art, l’architecture et le design dans la lignée de Richard Artschwager ou de John Armleder. Les dessins, photographies et peintures renvoient à des décors emprisonnés dans l’espace bidimensionnel (intérieurs, vases, stores) quand les sculptures décrivent des objets inusités, à la perspective souvent tronquée (table à dessin). Dans ce jeu de faux-semblant et de mises en abîme, ces intérieurs factices recomposent l’espace d’exposition. À Marseille, pour l’édition 2010 d’Art-O-Rama, ses collages, peintures et sculptures ne s’intègrent plus dans une architecture donnée, ils engendrent une nouvelle définition de l’espace. Les modules proposés par Theunis sont à la limite de la scénographie, de l’installation et de l’architecture. En 2009, pour sa première exposition personnelle à la galerie Catherine Issert intitulée « Scherp & Schieve », l’artiste réalise une structure en porte-à-faux, reprenant le volume de la galerie à échelle réduite dans laquelle il propose de découvrir une série de peintures/collages. À la Backslash Gallery à Paris en 2013, il redistribue l’espace de la galerie par des murs peints et des plaques ondulées Eternit®, occultant parfois certaines oeuvres. Chaque exposition est une manière d’interroger les conditions de présentation des oeuvres. L’adhésif, outil de travail ordinaire et utilisé tel quel en communication ou en décoration, devient ici un moyen d’expression et de questionnement sur l’illusionnisme pictural. On pense à la Nature morte à la chaise cannée (où Picasso colle pour la première fois un objet étranger à la peinture : un morceau de toile cirée imitant le cannage d’une chaise), mais aussi et surtout à l’omniprésence actuelle du leurre et de l’imitation qui renvoie à la question de la reproductibilité et de la dématérialisation des images. Les thèmes volontairement traditionnels et ordinaires (natures mortes, paysages, intérieurs, etc.) subissent de légers décalages et basculements mettant en situation le procédé de fabrication : collage, imbrication et aplatissement des surfaces, modification de la perspective, jeu d’opacité et de transparence, effet de miroir et de duplication. Comme dans les adhésifs, les photographies interrogent la nature même du médium. La pratique de Theunis évolue vers une abstraction et une épuration des formes. Elle participe d’une esthétique du fragment privilégiant les restes et les à-côtés : chutes d’atelier, repentirs et martyrs (cales destinées à recevoir les dépassements d’usinage). Au MAMAC, l’artiste réalise un mural de chutes d’adhésif qui répond à des vues d’atelier comme autant d’images du travail. Theunis conçoit un module, sorte de duplication de l’îlot central, dans lequel sont réunies des « After », oeuvres conçues et réalisées à la manière de Xavier Theunis par d’autres artistes sur sa demande. Le Favelas et son martyr restituent un dispositif scénique composé d’un mur et d’une chaise faits de l’agrégation de chutes de bois. Des plaques ondulées Eternit®redistribuent l'espace de la galerie et occultent parfois certaines oeuvres. Volumes, installations et adhésifs illustrent ce travail de composition visant à produire de nouveaux espaces de représentation. Tout est là pour inquiéter notre rapport à l’image et à l’idéologie du White Cube.